Bill Bryson, Promenons-nous dans les bois, sur le sentier des Appalaches, Etats-Unis
Un livre drôle et pédagogique. « Promenons-nous dans les bois » de Bill Bryson narre les péripéties d’un randonneur amateur qui va affronter la fameuse AT, Appalachian Trail, environ 3500 KM entre la Géorgie et le Maine, aux États-Unis. Une épopée au cours de laquelle Bryson croque, avec brio et humour, la société américaine.
Américain de naissance, anglais d’adoption, Bill Bryson décide d’affronter l’une des plus grandes et difficiles randonnées dans le Monde: l’Appalachian Trail (AT). Sentier de randonnée pédestre parcourant les Appalaches sur la côte est des États-Unis, le tracé de l’AT est imaginé par Benton MacKaye. Mais c’est un avocat, Myron Avery, qui en est le véritable instigateur: celui par qui la chimère est devenue réalité.
Néophyte, le futur et valeureux marcheur se rend alors dans des magasins spécialisés, où les gens parlent un « dialecte équipementier » que Bill Bryson n’arrive à comprendre: « Cette tente a un double toit en polyester, tissage ripstop 70 deniers, 210 fils au pouce, haute densité et résistant à l’abrasion. Les coutures n’ont pas de biais mais sont simplement rabattues, avec doubles surpiqures, et l’habitacle est un peu exigu.» Comme l’écrit Bill Bryson: « Je n’avais jamais été aussi perplexe et impressionné à la fois.»
Afin de se renseigner sur la flore et la faune, Bryson achète également de nombreux livres qui l’affolent sur les bestioles, petites et grosses, qu’il rencontrera lors de sa marche: Vous saviez que les ours adoraient les Snickers ? Qu’ils courraient à vive allure ? Qu’ils grimpaient aisément aux arbres ? ,etc. « Imaginez-vous, ou essayez du moins, étendu tout seul dans le noir, avec à peine quelques microns de nylon frémissant entre vous et l’air froid de la nuit, à écouter un ours de 180 kilos déambuler à proximité. Imaginez ses petits grognements, ses chuintements mystérieux, ses pas feutrés, sa respiration lourde, le fracas des gamelles renversées, les bruits baveux de mastication et le frottement sifflant de son arrière-train me long de votre tente. Imaginez la soudaine décharge d’adrénaline, le désagréable picotement dans les avant-bras à la perception d’une secousse brutale, inattendue, provoquée par son museau contre la base de l’habitacle. Imaginez le chancèlement inquiétant de votre fragile coquille négligemment calé près de l’entrée, avec , vous vous en souvenez maintenant, une barre de Snickers dans un des poches. Les ours adorent les Snickers, on vous l’a dit. »
Bryson se lance donc dans l’aventure avec un ami d’enfance, Stephen Katz, qu’il n’a revu depuis des années: « Dans quel genre de forme es-tu ? », demande au téléphone Bryson, et qui, en guise de réponse, obtient un ferme et tranchant: « Très bonne. Je vais partout à pied ces temps-ci. » « Vraiment ? », questionne Bryson avant de penser: « c’était plutôt inhabituel en Amérique » (90 % des étasuniens prennent leur voiture pour faire 200 mètres. Est-ce la cause ou la conséquence du fait qu’il ne vaut mieux ne pas être piéton aux États-Unis, complètement inadaptés à tout ce qui est pédestre ?) . « Ben, il m’ont retiré le permis, tu sais. » « Ah ! »
Cependant, deux jours avant le départ, la réalité des mots se heurte à la bonhommie du personnage Katz: un ancien alcoolique souffrant d’embonpoint et à l’humeur acariâtre dés qu’il s’agit de faire un effort. Le voyage sera bien long…
Cependant, deux jours avant le départ, la réalité des mots se heurte à la bonhommie du personnage Katz: un ancien alcoolique souffrant d’embonpoint et à l’humeur acariâtre dés qu’il s’agit de faire un effort. Le voyage sera bien long…
Pourtant, l’idéaliste et rêveur Bryson s’embarque sur l’AT avec l’imprévisible Katz. Un chieur auquel on s’attache. Une alchimie se créée. Les dialogues entre les deux compères sont souvent hilarants. En outre, nombres de rencontres insolites ponctuent le récit qui, de temps en temps, décroche sur des faits historiques.
Par exemple, connaissez-vous la petite ville de Centralia, en proie à un feu de mine accidentel depuis 1962 ? Sa population est passée de plus de 1000 personnes, à 7, et le code postale de la ville a même été supprimé en 2002. Une ville fantôme dont le sol brule, et continuera à honorer de sa vive chaleur Prométhée durant 250 ans ( voir 1000 ans, selon les sources.)
Il y aussi le procès ( et la condamnation) de l’hérétique John T. Scopes, un instituteur qui dans une petite ville du Tennessee, Dayton, a eu l’outrecuidance d’éclairer ses élèves sur l’origine de l’homme, qui descendrait du singe. En 1925, le darwinisme est mal vu dans cet état qui lui préfère le dessein intelligent et qui attendra 1962 avant d’abolir sa loi, le Butler Act qui interdisait aux enseignants de nier « l’histoire de la création divine de l’homme, telle qu’elle est enseignée dans la Bible. »
Les descriptions peuvent paraître longues, un peu complexes à aborder pour des étrangers, non coutumiers de la géographie de l’Amérique du nord. Mais toutes sont plus captivantes les unes que les autres. En effet, Bryson n’a pas son pareil pour distiller au fils des pages, dans ses diatribes, des « points culture. » Sans s’en apercevoir, le lecteur, dans sa fluide lecture, s’informe en se marrant.
« Promenons-nous dans les bois » est donc à lire, faute pour vous de pouvoir parcourir cette randonnée qui se meurt au fils des ans du fait d’une laxiste et bancale politique environnementale de la part des États-Unis. Et ce n’est pas le tigre de papier qu’est l’association à but non lucratif Appalachian Trail Conservancy qui ira défendre et préserver ce merveilleux site…
Envie d’en savoir plus ? A lire Promenons-nous dans les bois, de Bill Bryson, 352 pages, aux éditions Payot.
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